Javier Piña : raconter Paris à l’infini

À 32 ans, Javier Piña (alias @javeirnapi) est un vrai touche-à-tout ! À travers ses photos comme avec les mots, ce qui l’anime, c’est de raconter de belles histoires. Il a créé dans cet esprit la communauté @parisenespanol, un compte destiné à faire découvrir aux hispanophones le Paris dont il est tombé amoureux il y a presque 5 ans. De ses anecdotes de néo-parisien à son organisation quotidienne, Javier nous dit tout !

Parlez-nous un peu plus de vous !

Je suis photographe et graphiste et je viens de Barranquilla, en Colombie. Une ville assez connue, car Shakira en est originaire aussi ! J’ai étudié le graphisme et j’ai travaillé à la fois pour des médias et des agences de publicité, notamment en Argentine. Dans ce contexte, j’ai été amené à faire pas mal de travail de retouche photo. À l’époque, j’aimais déjà la photographie, mais j’avais plus la tête à faire la fête et je voyais la photographie comme un loisir ! 

Depuis combien de temps vivez-vous à Paris et qu’est-ce qui vous a poussé à vous installer dans cette ville ? 

Comme pas mal de gens, je me suis retrouvé à Paris par amour ! J’ai suivi ma copine, qui est française, et nous nous y sommes installés en 2016. Petit à petit, c’est comme si ma passion pour la photographie se révélait : je trouvais cela trop dommage d’habiter une si belle ville sans la photographier !

Comment se sont passés vos premiers mois dans cette ville inconnue ? 

Quand je suis arrivé, je ne parlais absolument pas français, donc c’était assez compliqué. Je me débrouillais en parlant anglais et je pensais au départ qu’il serait facile de trouver du travail comme ça… Mais pas du tout ! J’ai suivi des cours intensifs de Français et ma copine m’a accompagné à chaque étape de mes recherches. J’ai fini par effectuer un stage dans une agence de graphisme, suivi de quelques petits boulots en tant que serveur pendant lesquels j’ai énormément progressé en français. Je me suis ensuite lancé en tant qu’auto-entrepreneur dans la photographie touristique. 

Quelle est la chose la plus folle/amusante qui vous soit arrivée à Paris ?

Globalement, je dirais qu’il y a pas mal de choses qui font désormais partie de mon quotidien mais que je trouvais dingues à mon arrivée. J’ai fait partie de ces touristes qui demandent à se faire prendre en photo devant la Tour Eiffel… Et maintenant j’immortalise à mon tour les gens devant ce symbole ! L’autre chose que je trouve marrante et qui est très caractéristique de Paris, c’est le fait de croiser très souvent des célébrités un peu partout : dans la rue, au restaurant… En Colombie, ce serait impensable ! Et puis en tant que photographe, je me suis retrouvée à assurer des missions mémorables, comme une séance photo au Louvre avec un ancien Président de la République !

Vous avez également créé une communauté en ligne appelée @parisenespanol, pouvez-vous nous en dire un peu plus ? 

Je dirais que l’expérience que nous avons eue à Buenos Aires avec ma copine m’a pas mal influencé. Lorsqu’on y vivait, on aimait découvrir plein de petits spots sympas et méconnus des touristes. C’est quelque chose qui m’a beaucoup manqué en arrivant à Paris, car la plupart des guides en ligne proposaient des références très touristiques. Je me suis naturellement tourné vers Instagram avec l’idée de partager mon expérience et de créer une communauté. J’avais envie de parler du Paris que j’aime, de son côté un peu mystérieux et très multiculturel.

Est-ce qu’en tant que personne hispanophone, vous avez trouvé Paris accessible lorsque vous vous y êtes installé ? 

Je dirais que, comparée à d’autres personnes, mon expérience a été relativement facile, dans la mesure où je connaissais pas mal de gens – notamment rencontrés à Buenos Aires – sur Paris avant d’y arriver. Avoir un petit réseau en amont est clairement un point positif, que ce soit côté vie sociale et culturelle ou d’un point de vue professionnel. Sans personne pour « déchiffrer » la culture, il est difficile d’éviter les petits chocs culturels du quotidien. C’est bête à dire, mais rien que pour le langage corporel, il y a des petites choses auxquelles on ne prête pas attention. Par exemple je suis très souriant et plutôt tactile, mais à Paris ce n’est pas forcément l’état d’esprit de base quand on ne connaît pas une personne. Je dirais tout de même par expérience que les latinos ont globalement une bonne réputation en France. 

Si vous pouviez avoir la même vie dans n’importe quelle autre ville du monde, où ce serait et pourquoi ? 

En Europe, niveau sécurité, il y a la possibilité de travailler avec un appareil photo un peu partout, y compris en pleine rue. C’est plus compliqué dans certains coins d’Amérique latine. Si j’avais le choix, j’aurais beaucoup aimé vivre et travailler à Buenos Aires, Rio de Janeiro, ou encore Carthagène des Indes, une ville colombienne colorée à souhait. En Europe, je me verrais bien à Rome, parce qu’à l’instar de Paris, c’est une ville qui regorge d’histoire. J’aime également beaucoup Lisbonne et Barcelone, pour leur côté à la fois urbain et balnéaire. 

Photographie, guides touristiques, faits historiques… Vous travaillez sur une multitude de contenus, qu’est-ce qui vous a inspiré à vous diversifier de cette manière ? 

À la base, j’aime beaucoup raconter des histoires, mais les débuts n’ont pas pour autant été faciles. C’est un exercice auquel je n’étais pas habitué et je me suis donc pas mal entraîné avant d’arriver à un résultat plus qualitatif. Côté technique, ça crée aussi un engagement plus fort avec les gens. Et je dois dire que travailler sur des contenus très variés est plus intéressant. En définitive, ce compte aide des personnes qui ne parlent pas forcément français à découvrir Paris et à s’approprier la ville pour la découvrir dans les meilleures conditions. Cela passe aussi par des petites infos toutes simples : la carafe est gratuite au restaurant, bien faire attention à ses effets personnels dans le métro, se méfier des arnaques à proximité des monuments… Un tas de conseils que j’aurais aimé recevoir avant de venir !

Qu’est-ce qui vous manque le plus de la vie « avant la Covid-19 » ? 

Je suis avant tout photographe pour les touristes, le cœur de mon métier, c’est donc de partager des moments avec eux. Chaque instant à leur côté est incroyable, car ils voient la vie d’une autre manière, ça me rappelle mes premiers moments à Paris : les découvertes, les surprises… Certaines personnes pleurent la première fois qu’elles voient la tour Eiffel ! Ce sont toutes ces choses-là qui me manquent aujourd’hui.  

Comment gérez-vous votre temps entre vos différentes tâches ? 

Honnêtement, c’est loin d’être simple ! D’ailleurs, il m’aura fallu pas mal de temps pour m’organiser, à plus forte raison parce que je travaille depuis chez moi. En réalité, ça fait environ un an et demi que je peux dire que je suis mieux organisé. J’ai pris l’habitude de noter à l’avance ce que je dois faire dans la journée, voire dans la semaine. Et c’est vraiment nécessaire, car certaines tâches, comme répondre aux messages Instagram peuvent paraître anodines mais requièrent pas mal de temps, et d’autant plus lorsqu’il faut animer deux comptes en même temps ! C’est pareil pour la retouche photo et la création de contenus, alors j’essaie d’accorder du temps à chaque activité à l’avance. J’essaie également d’optimiser au mieux les « temps morts » : par exemple, je profite de mes trajets en métro pour répondre à un maximum de messages. De temps en temps, je m’accorde une petite pause numérique pour souffler un peu. Je sais que les algorithmes en pâtissent certainement, mais la santé mentale passe avant tout le reste ! 

Si vous deviez choisir une seule activité professionnelle ce serait ? 

C’est vraiment une question compliquée ! Mais je crois que je choisirais la photo, parce que ça me permettrait de travailler à la fois chez moi et en extérieur, seul et au contact des gens. Et puis la photo est un beau moyen de raconter une multitude d’histoires en un seul cliché.

Quels sont vos prochains projets ? 

Je travaille sur un site web pour @parisenespanol, qui permettra aux gens d’accéder plus facilement aux informations. J’aimerais également beaucoup produire des vidéos pour ce site à l’avenir. Côté photo, je suis en train de développer mon e-shop pour mettre en vente des impressions de mes photos. C’est une idée que j’avais en tête avant la pandémie, mais qui se concrétise maintenant pour ne plus me limiter à la vente de services. 

Quels sont vos espoirs pour l’industrie du voyage post-Covid-19 ?

J’espère sincèrement que les gens voyageront avec un état d’esprit plus responsable pour la planète. En d’autres termes, j’espère que le fait de ne pas avoir voyagé pendant une longue période aura un impact positif durable.